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Pierre Berbizier :

 

et puis il y a eu

l'hiver 1981

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Sa part de lumière a percé l'épaisse carapace un mardi, dans l'ombre du Théâtre national de Toulouse. Au cœur de la ville Rose. Face aux projecteurs, juste avant le premier clap, Pierre Berbizier, poignée de main ferme, est apparu souriant. Avenant. Loin de cette froide image qui lui colle à la peau comme un maillot trempé par un terrain boueux. Loin de ce double qu'il a construit pour protéger une âme qu'il préserve farouchement des écorchures. « Ce métier, dit-il, m'a appris le vice mais j'ai toujours eu la naïveté de croire en certaines personnes ; et j'ai été déçu ». Décrit comme un personnage « retors », « renfermé », voire « austère », il s'est mis à plaisanter sur le « rugby français ». Le courant est passé. D'abord branché sur son enfance. Celle d'un de ces gamins que les mémés d'ici, celles qui aiment la castagne, baptisent affectueusement « les drôles ».


« J'ai vite pris conscience qu'il fallait être à la hauteur

de la situation quand on était choisi »


Son premier ballon, il l'a touché dans les rues de Pinas, petit village des Hautes-Pyrénées, situé à 5 km de Lannemezan. Sur ce Plateau où il a ses racines. Là où les hommes ont la réputation d' être aussi obstinés que rugueux. « Une éducation dans la rue, se souvient-il, à l'école communale, sur la place de l'église, le matin avant de partir à l'école en bus scolaire. Il y avait le quartier de la Vieille contre celui de La Carrère. J'avais le privilège d'être sélectionné avec La Carrère. ». Il raconte des « parties folles », laisse deviner des heures heureuses sans jamais lever complètement le voile.


 A 10 ans, il entre à l'école de rugby de Lannemezan. Il découvre le plaisir du jeu « et le combat ». Il perçoit déjà une autre dimension. Celle du « principe de la sélection ». « Les grands venaient me chercher pour jouer avec eux. Il y avait quatre ou cinq ans de différence entre nous. J'ai vite pris conscience qu'il fallait être à la hauteur de la situation lorsqu'on était choisi ». Cette pensée fondatrice explique son perfectionnisme et l'intransigeance qui en découle.
En 1975, avec les cadets de Lannemezan, Pierre est sacré champion de France en battant Toulon (19-3). En raison d'un problème de pelouse, c'est la seule finale qui ne s'est pas jouée en lever de rideau de celle des grands. Elle s'est déroulée à La Croix-de-Berny où, trente ans plus tard, il sera entraîneur du Racing-Métro. Signe du destin ?


En Armagnac-Bigorre, terroir authentique composé du Gers et des Hautes-Pyrénées, le ballon ovale a une dimension quasiment religieuse. Toutes les chapelles se connaissent. Henry Broncan, figure emblématique du rugby des clochers du Sud-Ouest, a eu, joueur à Mirande, un entraîneur nommé René Berbizier, le père de Pierre, avec qui ses rapports ont été tendus. « Par ma faute », précise-t-il. Le sorcier gersois se rappelle parfaitement avoir vu jouer le jeune Pierre Berbizier à l'occasion d'un match opposant les cadets de Lombez-Samatan à ceux de Lannemezan. « Il n'était pas, décrit Broncan, un joueur qui brillait mais son rugby était étudié, calculé, précis. Il était déjà très dur avec lui-même et avec les siens ». Et d'ajouter : « Il a continuellement été dans la recherche. Trop peut-être. Il a toujours eu un caractère exigeant avec lui et avec les autres. Voilà pourquoi, il a souvent été contesté. Je crois qu'il n'a jamais supporté qu'un garçon ne donne pas tout, comme lui le faisait. J'ai beaucoup aimé le joueur Pierre Berbizier ». Travail, rigueur, exigence sont les trois piliers qui le soutiennent. Celui du plaisir simple de ce jeu a disparu un hiver. Précisément le jour de sa première titularisation en équipe de France.


« On a découvert que je jouais à la mêlée au plus haut niveau alors que j'avais une expérience conséquente à Lourdes »


Le 17 janvier 1981, Pierre Berbizier attaque son premier match avec l'équipe de France. A la mêlée. Comme son grand-père François l'avait prédit. 
« Le bain familial » compte pour lui. Il le reconnaît et illustre le propos en soulignant avoir « d'abord été trois-quarts centre par atavisme ». Après avoir joué à Mazamet avec Lucien Mias et avant d'être un homme incontournable du club de Lannemezan où il fut tour à tour joueur, capitaine et entraîneur, son père, René, a été au centre de l'attaque du TOEC qui, à la fin des années « 50 », était aussi aussi fort, voire plus fort que le Stade toulousain. «  Aillères, Gruarin, les frères Arné, Astrugue, Corbarrie...», il cite à la volée les coéquipiers du paternel. Il a de la mémoire.


International junior au centre « avec  Codorniou et la génération Blanco », il s'épanouit à ce poste  avant de se fixer à la mêlée à Lourdes.  Wikipedia ne le sait pas mais, en neuf, il a été trois fois champion de France universitaire alors qu'il suivait sa formation de professeur d'EPS au CREPS de Toulouse à l'époque d'un certain Robert Bru !  « On a découvert que je jouais à la mêlée au plus haut niveau alors que j'avais une expérience assez conséquente à Lourdes », fait-il remarquer un brin amusé.


A-t-il été trop tôt en équipe de France comme certains le pensent ? Jacques Fouroux le préfère à l'époque à un Jérôme Gallion réputé plus vif. Ce choix a animé les conversations de comptoir  pendant quelques années. « Pierre, souligne un de ses proches, n'était pas forcément très doué mais c'est un bosseur terrible avec une volonté terrible. Il était malin, intelligent, courageux. Il progressait. C'était un leader ».


Si, à Lourdes, il est abonné au dernier carré, il touche son premier – et dernier – bouclier de Brennus avec Agen. En 1988. 9-3. Une finale cadenassée*. « J'ai vu beaucoup de finales pas plus jolies mais Agen, c'était le système Ferrasse... On tapait plus facilement sur ce club. La loupe médiatique amplifiait les problèmes d'Agen. La finale de 1985, entre Toulouse et Toulon, est magnifiée en raison des prolongations mais sur le match en lui-même, vous restez sur votre faim ». Un peu plus tôt avant le sacre toulousain signant la fin d'une domination biterroise sans partage, le 19 mai 1985, en demi-finale, les Lourdais avaient été battus 6-3 par les Toulonnais. Ce fut son dernier match avec le FCL après dix saisons marquées par le grand Béziers et un Challenge Yves du Manoir.


Son premier match en seniors, il l'a disputé avec Lannemezan contre Villeneuve-sur-Lot, à Fleurance. Il ne l'a pas oublié. « Notre terrain était suspendu parce que Lannemezan s'était mal comporté la saison précédente ». Il n'a pas non plus oublié le score :12-12. Il en parle avec une certaine décontraction. Et puis ses mâchoires se serrent au moment de se remémorer sa « première » en équipe de France. Le sourire s'efface. Le visage s'assombrit. « Le jeu, le plaisir, c'était avant. Là, j'ai pris conscience du contexte environnemental. Cela dépassait le cadre du terrain ». Il songe au temps des critiques. Des lettres anonymes. D'un système médiatique qui l'a souvent montré du doigt.  Il n'en dit pas plus. Il se ferme. Première fêlure.


Bertrand chomeil


Parc des Princes, 28 mai 1988

SUA 9 – Stadoceste Tarbais 3 

M-T : 3-3. Arbitre : Michel Lamoulle (Côte Basque), puis M. Hourquet (Provence, 55e).

Beau temps doux. Terrain bon. Éclairage bon. Vent nul. 50.000 spectateurs.
Agen : Bérot, 2 pénalités (40e, 47e) ; Montlaur, drop (57e). 
Tarbes : Trille, pénalité (31e)
AGEN :  P. Bérot, B. Lacombe, P. Sella, G. Mayout, E. Gleyze, o) P. Montlaur, m) P. Berbizier, D. Erbani, M. Capot (P. Benetton, 48e), J. Gratton, B. Mazzer, P. Pujade, L. Seigne, D. Dubroca (cap.), G. Lascubé. 
TARBES :  V. Romulus, J. Schneider (P. Jouanolou 42e), B. Labat, Y. Crabé, E. Berdeu, o) J.P. Trille, m) M. Hondagné-Monge, A. van Heerden, P. Harislur-Arthapignet (L.C. Régent 66e), T. Janeczek, A. Maleig, P. Pellissier, P. Capdevielle, P. Dintrans (cap.), M. Crémaschi. 

Photo DDM, Xavier de Fenoyl

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« J'ai été formé à l'action »

« On vous a vendu les 10 cm de Benazzi moi j'ai toujours dit que c'était des kilomètres de préparation »

« Je suis parti d'un village

pour découvrir le monde »

​Générique

Magie

noire

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7 actes

Photo DDM, Xavier de Fenoyl

Né à Saint-Gaudens le 17 juin 1958

Poste : demi de mêlée


Clubs en tant que joueur :

Lannemezan (jusqu'en 1976)

Lourdes (1976-1985)

Agen (1985-1991)


Clubs en tant qu'entraîneur :

Narbonne (1998-2001)

Racing-Métro 92 (2007-2012)


56 sélections en équipe de France de 1981 à 1991 (13 fois capitaine)

Grand Chelem en 1981 et 1987


Entraîneur de l'équipe de France de 1991 à 1995


Entraîneur de l'équipe d'Italie (2005-2007)

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